Comment réussir une coupe à main levée ?

 

Hier, le 13 mars 2007, Christian le cousin de Pierre, plus connu sous le nom de Monsieur Devahif,

est venu nous montrer comment faire une préparation "définitive"  ( qui dure au moins 25 ans dans de bonnes conditions ).   Nous franchissons la porte au bout de l'escalier de béton...

Je ne m'attendais pas à un Christian comme cela. Je m'attendais à un monsieur sérieux, maigre, avec des lunettes et très bien habillé... Mais je préférais le Christian comme nous l'avons vu.

Sa spécialité c'est la microscopie, les préparations,... mais son vrai métier c'est l'enseignement

en agronomie.

C'est toujours gai de faire la rencontre de quelqu'un !... Surtout avec une personne comme Christian qui n'hésite pas à ajouter une touche d'humour de temps en temps !

Mais pour ce genre d'activité il faut un minimum de sérieux... ce qui se retrouve dans son caractère.

Je n'avais pas peur et je n'étais pas stressée; j'étais même contente de faire quelque chose que je n'avais pas encore fait :  une préparation définitive.

Je me suis dit « Chouette on va faire des coupes ! » et je me suis imaginé tous les appareils :

un bistouri, une pince pour prendre les couches de cellules,...

J'ai aussi imaginé que les coupes qu'on allait faire seraient dans des matériaux spéciaux.

Mon imagination m'a complètement trompée; on a fait nos coupes avec des lames de rasoir Gilette. Mais c'était quand même génial.

 

C'était bien la première fois qu'on devait découper une fine tranche, parce que l'on a toujours observé des choses faciles à prendre. ( Par exemple l'élodée : il suffisait de prendre une de ses "feuilles" pour la regarder... )

Cet homme très gentil comptait nous faire découper une bonne centaine de fois dans une carotte pour attraper le coup de main pour couper fin.  Je suis sûre que ça va être un jeu d'enfant.

Alors, il nous a donné à chacun des bouts de carottes et une lame. Je l'avais prise du mauvais sens et je me suis coupé mais après, ça a été.

En guise de "matos" donc :   une carotte, ( miam )   +   une lame de rasoir   +   une lame porte-objet.

 

Après 50 coupes vous n'y arriverez toujours pas, disait Christian.

Pour le début, c'était encourageant !  Après il a rajouté : « Attention à la lame de rasoir, si vous vous coupez, c'est directement l'hôpital Molière ! !  »

Je me suis dit que la manipulation de la lame allait être plus dure que d'obtenir une fine tranche de carotte. Je m'attendais à sortir du cours avec un ou deux doigts en moins.

Faire une coupe dans une carotte ? Non, je rêve !

Pourtant c'est bien la réalité :  il faut faire une coupe ( ultra fine ) dans un bout de carotte !

Généralement on réussit après 30 ou 50 essais ?  Je parie que je vais réussir au 10ème !

Avec une lame de rasoir ?  C'est censé être pour les poils, les lames de rasoir !

N'ayons pas peur des mots, je trouve cela RI-DI-CU-LE.

 

Hoo !  La grande lame de rasoir au coin de mon banc qui me regarde de son petit oeil menaçant et qui semble me narguer et me dire : « Pour toi, cet après-m'  c'est l'hôpital Molière. »

J'ai regardé la lame du coin de l'œil. Je la soupçonnais d'être un assassin...

Mais pour ne pas me laisser impressionner, j'ai pris mon courage à deux mains et pris dans ma main Mlle Gilette. Il fallait faire super gaffe de ne pas se couper. C'était le "suspensoir" total.

Je l'ai prise du bout de doigts et en tremblant j'ai touché la carotte; enfin, j'ai coupé un bout.

 

Quelques minutes plus tard je trouvais déjà ça fatiguant de couper la carotte, mais quand Christian m'a dit que des gens faisaient toute leur journée, je me suis dit que  je ne devais pas me plaindre et donc j'ai continué.

À un moment j'ai rigolé parce que Jeremy coupait ses carottes comme ma grand-mère !

À d'autres moments, ça m'énervait de couper les carottes parce qu'à chaque fois je me disais « Cette fois je vais réussir. » mais je ratais quand même.

C'est dur !  Beaucoup trop dur !  À chaque fois que j'essaie de couper dans cette foutue carotte, soit je dévie, soit c'est tellement fin que la coupe se déchire...

Après 10 minutes j'avais l'impression d'être un robot en train de faire toujours la même chose ou une mémé qui pèle ses patates ! !

Au plus ma carotte rapetissait, au plus je me disais que j'étais nulle ! !

Je commence à désespérer. Je m'arrête quelques minutes, et me défais de la bulle qui m'avait entourée durant ma tâche... Je regarde autour de moi. La moitié était désespérée comme moi.

4 élèves avaient réussi...

 

Puis quand Pierre a allumé le bec Bunzen pour chauffer la plaque de Malassez, je me suis pris pour un grand scientifique dans son laboratoire... Il dégageait une forte odeur de gaz.

 

Ce n'est qu'après encore quelques essais que j'ai trouvé une coupe qui me semblait bonne.

J'ai crié « VICTOIRE ! »; j'avais enfin une tranche qui, devant les néons crus, était grise et débarrassée de cette maudite teinte carotte !  J'étais fier de moi.

Pour moi, c'était un petit exploit d'avoir réussi à couper une tranche qui fait même pas 1/10 de mm d'épaisseur. C'était aussi un exploit parce que les 100 tranches antérieures, Christian les avait qualifiées comme « bonnes pour un bouillon ou une salade ». ( Mais ensuite il avait ajouté que Rome ne s'est pas faite en un jour et que pour une première fois, c'était normal. Alors là, ça m'avait bien remonté le moral... )

Je l'ai déposée dans le petit récipient avec de l'eau pour qu'elle ne sèche pas puis je l'ai déposée sur une lame P.O. . Mais avant de couvrir la tranche de cellules, nous ajoutons quelques gouttes de glycérine chauffée par le chauffe biberon de l'enfance de Kiara.

Alors j'ai fait la file pour mettre sur ma préparation de la glycérine. Quand elle était mise, je n'attendais plus qu'une chose :  poser mon couvre-objet.

Quand je l'ai fait, j'étais devant un problème. Ce n'était pas à ça que je m'attendais : le couvre-objet était bancal. « Mais !  La plaquette bascule !  Pas beaucoup, mais quand même !  Bon, allez, c'est pas si grave que ça, après tout, c'est pour nous préparer... Il faut toujours apprendre de ses erreurs. »

Moi par contre, je suis retournée toute fière à ma place et j'en ai profité pour montrer ma préparation à tout le monde. J'ai eu beaucoup d'appétit, j'ai été de table en table en mangeant les petits bouts de carotte délaissés...

Comment continuer ?  Avec Odile qui me charrie sur mon bout de carotte et 3 autres élèves qui sont dans le même cas que moi et mon bout de carotte ( disparu ).

J'avais l'impression qu'après ça on avait fini mais j'ai remarqué  - en mettant le couvre-objet -  que le morceau de carotte était toujours trop gros. Alors j'aurais dû encore couper mais j'ai pas eu le temps.

Après, on a mis les préparation sur une plaque chauffante aussi appelée plaque de Malassez et je suis parti. Moi aussi, je mets ma préparation à côté des autres sur la plaque chauffante…

et puis j'étais déçu de partir de la classe.

[ Pour rendre nos préparations définitives, Nathalie et Pierre auraient dû "coller" le couvre-objet avec du vernis. ]

 

Voilà mon après-midi cible de 13:45 à 15:15.

 

De retour à la maison...

-  Donc chouette journée ?

-  Oui, très !  J'étais contente d'apprendre du nouveau.

   C'est souvent comme ça : on stresse sur le moment et avec le recul,... on est content !

Un quart d'heure après je vais devant l'ordi' et mon père m'appelle :

-  Tu viens m'aider à faire le souper ?!

-  J'arrive mais... qu'est-ce qu'on mange ?

-  Euh... des carottes ... !         ;-)